Défis et chantiers pour repenser l'action publique de proximité, Luc Gwiazdzinski

Contribution finale
Rapport du groupe de travail sur l’action publique de proximité
Assemblée des départements de France


« Trop de distance et trop de proximité 
empêche la vue ».
Pascal


Les bouleversements économiques, environnementaux, sociaux et culturels à l’oeuvre à différentes échelles dépassent la seule question des réformes administratives et territoriales.

Ils remettent au cœur des débats, le citoyen, l’habitant dans ses pratiques et ses usages. Ils permettent de rappeler qu’un territoire qui se développe, attire et dans lequel chacun se sent bien est d’abord un territoire organisé où l’on se rencontre et où l’on échange.

Le big bang des organisations et des territoires oblige à changer de regard pour repenser l’action publique de proximité, transformer les inquiétudes en défis à relever et en chantiers à engager, passer de la résistance à l’offensive et se projeter ensemble dans le nouveau siècle.


Des défis à relever

Le défi de la complexité. Nous devons nous résoudre à ne pas pouvoir saisir la totalité du temps, ‬de l‘espace qui nous entoure. Edgar Morin nous a prévenu : « la complexité est un mot problème et non un mot solution ».

Le défi de l’hypermodernité. Nous devons apprendre à penser les choses dans le sens de la complémentarité et non de l’opposition, de la complexité et non de manière binaire et sectorielle.

Le défi du temporaire, du mobile, du labile et de l’intermittent. Dans une société des flux et de la mobilité, il paraît illusoire de vouloir faire coïncider l’urbs et la civitas dans une énième tentative de délimitation du «territoire pertinent» et de son mécano institutionnel. Les politiques publiques doivent passer d’une logique de stock à une logique de flux en intégrant les agencements et assemblages temporaires, mobiles, labiles et intermittents à leurs logiciels d’observation et de gestion.

Le défi de l’hybridation. Nous devons apprendre à penser la polyvalence et l’hybridation des lieux, des temps et des organisations. Les tiers lieux, le tiers paysage sont d’autres manières d’aborder le mondes, d’autres représentations et réponses possibles.

Le défi de l’ouverture et de la coopération. Les territoires et leurs acteurs ont besoin de tisser des alliances et de monter des projets en collaboration, de co-élaborer, de partager et de co-construire à toutes les échelles.

Le défi de l’intelligence territoriale. Il faut passer d’une approche sectorielle à une intelligence collective des systèmes dynamiques complexes. Cette intelligence territoriale peut prendre la forme de plateformes d’innovation ouvertes, de fabriques territoriales qui permettent de travailler avec l’ensemble des parties prenantes sur de nouveaux imaginaires et sur l’émergence d’une nouvelle citoyenneté.

Le défi des récits pluriels. Dans un cadre en mutation, il faut construire de nouveaux récits fédérateurs à l’échelle de nos vieux pays, territoires, métropoles et quartiers.

Le défi de l’expérimentation. Face aux doutes et à la complexité, les réponses attendues sont davantage des réponses en termes d’expérimentations même modestes que de discours.

Le défi de l’intérêt général. Les recompositions en cours obligent à repenser la notion centrale d’« intérêt général » dont l’Etat était le dépositaire et de sa « relocalisation » éventuelle à une échelle suffisante pour permettre les arbitrages.

Le défi de la démocratie et de la confiance pour des citoyens augmentés. Le futur des relations entre temps, espace et habitants temporaires nécessite d’accepter une certaine « infidélité territoriale » et de construire de nouveaux « contrats de confiance » entre les différents acteurs, fussent-ils à durée limitée et renouvelables à toutes les échelles de la fabrique territoriale (lecture, écriture et gestion) notamment pour celles et ceux qui vivent à l’écart des métropoles et craignent l’émergence de nouvelles frontières et le déclassement.


Des chantiers et des leviers

Les défis à relever doivent être transformés en leviers de l’action publique de proximité et en chantiers   à différentes échelles :

- Le premier chantier concerne les échelles temporelles de la démocratie locale. Face à l’éclatement des temps, des espaces et des mobilités, nous aurions intérêt à refonder nos institutions autour de l’idée d’une « citoyenneté présentielle » qui prenne notamment en compte le fait que nous sommes désormais des individus polytopiques et que nous votons là où nous dormons et non là où nous vivons éveillés. Nous pourrions imaginer devenir les « citoyens temporaires » des espaces dans lesquels nous passons du temps. Mais nous ne sommes pas encore prêts à imaginer les contours d’un système qui mettrait en valeur « l’ici et maintenant » et la « situation » au sens de Guy Debord, loin du traditionnel contrôle d’un territoire aux limites strictes avec ses frontières, ses financements et ses élus. Pourtant les occupations d’espaces publics pour des manifestations spectaculaires mais également « l’élection de maires de nuit » à Paris, Toulouse et Nantes obligent à réfléchir à un autre rapport à l’espace et au temps et au temporaire.

- Le second chantier très lié concerne les échelles territoriales de la démocratie locale. Il repose sur l’analyse du système territorial français qui croisait la vision froide de l’Etat arbitre et la capillarité fine de la commune héritière de la paroisse et échelon de base de la démocratie. Nous avions écrit ailleurs (Gwiazdzinski, Rabin, 2008) : « avec la montée de l’intercommunalité et l’effacement progressif de l’Etat, nous risquons d’assister à la disparition des maires, derniers gardiens de la République et d’une certaine idée de la France. Avec cette disparition, nous risquons de tout perdre à la fois : la capacité d’intervenir sur le long terme et d’arbitrer à une échelle supérieure dans le sens de l’intérêt général avec l’Etat et la capacité de gérer les problèmes quotidiens au plus près, c'est-à-dire à l’échelle de la commune ou du quartier avec le maire ».
La question de la présence de l’Etat ne se pose malheureusement plus, tant elle s’est étiolée sur les territoires. La question des communes et de la démocratie locale reste posée notamment dans les grandes villes et les futures métropoles où le citoyen est nécessairement éloigné des élus. Pour l’instant, dans les grandes villes, le seul élu à l’échelon des quartiers reste le Conseiller général avec des compétences différentes. La dérive vers un scénario européen d’éloignement et de désincarnation du pouvoir n’est pas loin.

Dans les systèmes métropolitains, il faut donc réfléchir à l’approfondissement de la loi PLM et à la construction d’unités démocratiques de base (10 à 20000 habitants), pendants urbains des communes rurales aux moyens et compétences désormais limités avec la montée de l’intercommunalité. Légitimes car élus à cette échelle sur la base d’une campagne électorale de proximité, les maires de quartiers urbains pourraient devenir les acteurs et organisateurs de démarches de développement local à l’instar de ce qui existe en milieu rural et accueillir les initiatives de démocratie participative.

- Le troisième chantier lié au big-bang territorial concerne des organisations particulières dont on parle très peu dans les différentes réformes et qui participent à l’action publique de proximité : les agences, associations… Ces « faux nez », (agence d’urbanisme, de développement, des mobilités…), outils armés des collectivités, interviennent dans des domaines importants comme le développement économique, l’aménagement et l’urbanisme. Leurs actions sont bien souvent illisibles pour les citoyens qui ignorent ce qu’apportent ces services et qui sont les financeurs.

Ces outils anticipent un décrochage entre le contrôle territorial et les dispositifs d’action parapublics. Soit ils seront broyés par le jeu des nouvelles plaques tectoniques de la réforme territoriale avec notamment une redistribution claire des rôles et des moyens, soit ils prendront un rôle central en devenant les acteurs  techniques de l’inter-territorialité, des outils d’une ingénierie territoriale partagée multiscalaire. Le second scénario est le plus probable d’autant que ces structures - quand elles épousent les limites des territoires établis (Région, Département…) - peuvent rassurer voire servir au maintien d’anciens réseaux et pouvoirs malgré la disparition de la collectivité à laquelle elles étaient liées. Avant la fusion des régions, on risque par exemple de voire se multiplier des agences régionales permettant aux systèmes en place de se maintenir. Dans tous les cas, les rôles, les fonctions, le pilotage et la gouvernance de ces organisations devront être examinés et mis en débat pour un grand public qui ignore jusqu’à leur existence.

- Le quatrième chantier concerne la définition de nouveaux contrats de confiance territoriaux nécessairement temporaires entre les citoyens, leurs élus, et leurs organisations techniques. Le mandat représentatif ne suffira plus à assurer la solidité d’un système territorial multiscalaire. Des coalitions sous forme de contrats, de pactes devront sans doute prendre le pas sur les logiques d’institution afin de gérer l’entre-deux, l’hybride et l’inter.

- Le cinquième chantier est celui du confort territorial, une notion qui doit permettre de repenser un service public de proximité remis notamment en cause par les mobilités, les tic et l’affaissement des ressources publiques et questionné par une demande nouvelle de la population en termes de bien-être voire de bonheur individuel.

- Le sixième chantier concerne le déploiement de nouvelles formes nouvelles de l’action publique, l’innovation ouverte, le design des politiques publiques et les outils qui permettent la partage des diagnostics, la co-construction des politiques, l’expérimentation et la co-évaluation. La diminution des moyens, la mise en place d’un nouveau logiciel, nécessiteront d’inventer de nouvelles formes d’action publique. La figure du territoire comme plateforme d’innovation ouverte permettrait de refonder une organisation et une action publique et d’imaginer un nouveau design des politiques et des territoires.  Les savoir-faire développés dans les démarches de développement local, les différents programmes d’initiatives communautaires et les réflexions actuelles autour de Living lab ou de Fab lab territoriaux vont dans ce sens.

- Le septième chantier concerne le personnel des collectivités. Il prend en compte le besoin de formation au design des politiques publiques, à l’innovation et à la créativité territoriale, leur capacité à imaginer et mettre en place les outils et politiques de l’action publique de demain. Il intègre également la gestion de ces équipes, de leurs compétences et les transferts de savoir-faire dans un contexte d’incertitude et de recomposition. Il intègre également la possibilité de constitution d’équipes mobiles d’interventions sur des chantiers d’innovation.

- Le huitième chantier concerne le temps long de l’aménagement du territoire et de la prospective. Il est intéressant de noter que face aux mutations de nos espaces et de nos temps, les réponses qui s’élaborent le sont dans des dimensions très particulières de l’espace et du temps : l’urgence et la proximité. Elles vont à l’encontre des réponses proposées autrefois par nos organisations et la modernité : le temps long du politique et l’espace profond de l’aménagement. La nécessaire souplesse de nos organisations, leur adaptation, ne peuvent nous exonérer d’une réflexion prospective qui permette de donner du sens à l’action publique et d’une refonte de l’aménagement du territoire qui permette de fixer des caps et de poser quelques balises dans le sens de l’intérêt général. La dialectique local-global, particulier-général, urgence-temps long, émotion-raison, développement local et aménagement du territoire peut et doit être repensée.

- Le neuvième chantier concerne le marketing territorial et ses limites. Si les démarches de développement local sont des moteurs du développement, le territoire n’est pas un yaourt. Ce n’est pas l’espace isotrope, homogène et lisse que l’on voudrait nous donner à consommer. C’est une réalité humaine et sociale complexe, un espace habité qui ne peut se résumer à une image et un slogan. C’est un espace complexe, rocailleux, qui demande du temps pour être traversé, domestiqué, approprié. L’identité territoriale ne peut se résumer à des clichés.

- Le dernier chantier est celui de « l’imagibilité » et de la réassurance territoriale c’est à dire de la capacité des pouvoirs publics et des élus à rendre rapidement intelligibles pour tous les nouveaux principes, les nouveaux dispositifs et les nouvelles organisations imaginées. C’est une question de représentation et d’ergonomie des politiques publiques. C’est une question démocratique. Chaque citoyen doit pouvoir les comprendre, se les approprier rapidement afin qu’une insécurité spatiale et territoriale ne s’ajoute pas à l’insécurité économique et sociale qui mine notre société et suscite des tentations de repli.

Il est peut-être possible de contredire le prince de Talleyrand « Quand c’est urgent, c’est déjà trop tard ».


(*) Luc Gwiazdzinski est géographe. Enseignant en aménagement et urbanisme à l’Université Joseph Fourier de Grenoble (IGA), il est responsable du Master Innovation et territoire et Président du Pôle des arts urbains. Chercheur au laboratoire Pacte (UMR 5194 CNRS) associé au MoTU (Université Biccoca et Politecnico de Milano) et à l’EREIST (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), il oriente des enseignements et ses recherches sur les questions de mobilité, d’innovation métropolitaine et de chrono-urbanisme. Expert européen, il a dirigé de nombreux programmes de recherché, colloques internationaux, rapports, articles et ouvrages sur ces questions : Urbi et Orbi. Paris appartient à la ville et au monde, 2010, L’Aube ; Nuits d’Europe, 2007, UTBM ; Périphéries, 2007, L’harmattan ; La nuit dernière frontière de la ville, 2005, l’Aube ; Si la ville m’était contée, 2005, Eyrolles ; La nuit en questions (dir.), 2005, l’Aube ; La ville 24 heures /24, 2003, L’Aube. Il a également dirigé une agence des temps et des mobilités, une agence de développement et une agence d’urbanisme et développement durable.


Citer l’article :
Gwiazdzinski L., 2014, « Défis et chantiers pour repenser l’action publique de proximité », Contribution au rapport Regards croisés sur l’action publique de proximité. Mobiliser les expertises pour préparer l’avenir des territoires, Algoé consultants, Assemblée des départements de France, Paris, octobre 2014, 65p.


Contact :
luc.gwiazdzinski@ujf-grenoble.fr



Grenoble, octobre 2014

Insécurités territoriales, Luc Gwiazdzinski & Gilles Rabin, Libération, 3 novembre 2014

Après avoir abandonné la souveraineté budgétaire et monétaire à l’Europe pour un gain politique et économique dérisoire, l’Etat français s’apprête à rétrécir encore dans la précipitation et l’improvisation des réformes mal engagées.
Course à l’abîme. L’Etat se déshabille. Il est bientôt nu. Lui, qui s’occupait du temps long, de l’aménagement d’un territoire profond et de l’intérêt général, semble soumis à la dictature du court terme, de l’urgence, de la proximité et de l’émotion. Dans un double mouvement, les fondements d’une Nation construite autour de la République et de l’Etat s’effritent. Les valeurs républicaines semblent passées de mode, et l’Etat se solde lui-même pour des raisons budgétaires auxquelles la réforme territoriale ne répondra pas.

Que va-t-il rester comme socle de la cohésion nationale en pleine crise économique, sociale et identitaire ? Pourquoi ajouter une insécurité territoriale à l’insécurité économique et sociale ambiante ? Dans un contexte en mutation où tous les repères sont bousculés, on ne modifie pas sans risques l’Etat et les territoires, figures de réassurance dans un monde incertain.

Mécano peu républicain. Le processus se traduit, notamment, par la perte de compétences de l’Etat et l’émergence concomitante d’étranges configurations territoriales qui composent un nouveau mécano institutionnel : la «grande région» censée être mieux adaptée à la compétition européenne ; la figure hybride du «département rural» contrepoids politique à une nouvelle vision urbaine de la France représentée par les «métropoles». En l’absence de stratégie cohérente à long terme, la négociation qui se déroule au jour le jour, au gré des jeux politiciens et du lobbying crée un sentiment de malaise et déstabilise.

L’Etat laisse de la place aux régions, qui n’en demandaient pas tant, et tente de rassurer les départements un temps condamnés et déshabillés par la création des métropoles. Personne ne comprend plus rien à la réforme, et les arguments avancés ne tiennent pas.

L’Etat «gaudille» en promettant de nouvelles compétences aux régions, autorités organisatrices des transports, développement économique et innovation, et même de l’emploi. Dans le même temps, il n’apporte aucun éclairage sur les ressources propres et sur une fiscalité régionale indépendante qui devrait, naturellement, accompagner ce transfert de compétences. Rentier pathétique, l’Etat, aux abois, lâche ses compétences mais tente de conserver le pouvoir à travers la maîtrise des cordons de la bourse. La vente à la bougie ne fait pourtant que commencer.

L’Etat solde, et tout semble devoir disparaître. Sous prétexte d’économie, la facture économique, sociale et culturelle finale risque d’être lourde.

Le fantasme «viril» de la taille des régions ne tient pas non plus. Une région est-elle vraiment plus forte et compétitive parce qu’elle pèse dix millions d’habitants ? Le Land de Hambourg est-il moins compétitif que la région de Catalogne ?

Si l’argument de la taille était recevable, pourquoi a-t-on créé des métropoles qui affaiblissent le pouvoir économique, politique et démographique des nouvelles grandes régions, comme la métropole parisienne en Ile-de-France ou Lyon et Grenoble en Auvergne-Rhône-Alpes. L’intérêt pour les citoyens, qui voient, à nouveau, s’éloigner les pouvoirs et les services, n’est pas immédiatement lisible. De leur côté, les acteurs économiques regardent le paysage se complexifier sans vraiment pouvoir en mesurer les avantages et les inconvénients.

Naufragés médusés. Face à cet abandon par l’Etat en rase campagne, les territoires déboussolés cherchent naturellement ailleurs des références entre le tribalisme à l’écossaise et l’ivresse du grand large incarné par des métropoles mondialisées. Naufragés, comme médusés, ils se laissent séduire par les figures d’un darwinisme territorial.

L’Ecosse et la Catalogne sont des figures vivantes de la première tentation. Quand on a le pétrole ou l’innovation, pourquoi dépendre d’un Etat qui n’apporterait que des contraintes aux plus riches au profit des plus pauvres. La Bretagne et l’Alsace, bâties sur leurs socles identitaires, ne disent rien d’autre. Lorsque les amarres avec l’Etat sont coupées, les plus forts peuvent manger les autres.

Dans un même mouvement, la «bouée métropolitaine» serait l’autre figure d’espoir. Les grandes agglomérations représenteraient l’intégration réussie, face à une ruralité qui s’effondrerait sur elle-même, coincée entre les barrages, les aéroports inutiles et les déserts peuplés d’usines à mille vaches dans un maillage relictuel de bourgs et de villes moyennes exsangues.

Archaïsmes. La carte qui s’esquisse peu à peu est celle d’un territoire formé de grandes régions lointaines, égoïstes et jacobines autour d’une capitale régionale et de son gouvernement, une France structurée par un archipel de métropoles irriguant des arrière-pays en voie de désertification. Les départements rescapés géreront l’entre-deux ou seront remplacés par des échelons techniques décentralisés de grandes régions. Survivants symboliques sacrifiés sur l’autel de l’intercommunalité et derniers remparts de la République, parés de toutes les vertus de la proximité mais désormais sans pouvoirs, les maires finiront de disparaître dans la nostalgie.

Ce choix est une erreur politique et économique. Erreur politique car la géographie se venge. Des territoires construits autour de réseaux de villes moyennes démontrent que l’action raisonnée et raisonnable porte ses fruits à long terme. Erreur économique car le «monde est plat» et l’intelligence collective a remplacé les économies d’échelle. Il n’y a pas de déterminisme dans l’économie. Le nomadisme des élites, couplé à la qualité de vie de nos territoires, est le garant d’un développement maîtrisé.

La République à la carte, qui se dessine à travers la fuite de l’Etat et la désorganisation des territoires, aura bien du mal à faire vivre, au quotidien, les principes qui ornent encore les frontons de certains de nos édifices publics : «Liberté, Egalité, Fraternité». Pire, dans une Europe «germanisée» où même les Etats fédéraux revendiquent des actions jacobines et où les territoires fleurissent autour de microprojets, la France prend du retard quand elle parie sur le gigantisme et l’urbain non maîtrisé.

Luc Gwiazdzinski, Gilles Rabin


Auteurs de : «la Fin des maires. Dernier inventaire avant disparition», FYP Editions, 2008 et «Urbi et Orbi Paris appartient à la ville et au monde», éditions de l’Aube, 2010.