Périphérique, artère ou frontière ?


18 avril 2013, par Babel Photo
Périphérique, artère ou frontière ?

Par Gilles Rabin, économiste

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Dans "Le Rhin" Victor Hugo rêve d'un fleuve devenu artère entre les ennemis irréductibles et non plus frontière symbole de chansons guerrières et jalonnée de lieux qui - de Clovis à Hoche - sont autant de cicatrices toujours à vif.

Le périphérique est ainsi. Il évite d'entrer dans la capitale et de géner son repos. Il permet de tangenter sans pénétrer, pratique ourlet des géographes hésitant encore entre deux mondes. Avant le politique parlait déjà de ceinture rouge, et Citroën quittait Javel pour Aulnay, amenant les ouvriers loin de la ville lumière. Paris ne change pas avec ses quais de la seine rendus aux piétons et excluant la voiture. Le banlieusard voituré est à nouveau victime de l'octroi. Il doit prendre les transports en communs pour payer son écho à la ville musée dans son décor de cinéma. Le périphérique est donc une "frontière rhénane" qui exclut.



Mais le périphérique s'agrandit. Avec  l'A86 et le système de transport du Grand Paris, le cercle s'élargit. Paris est devenu plus grand que la simple commune et ses vingt arrondissements. Paris fend l'armure et la ceinture doit desserrer quelques crans pour laisser la ville respirer. Le nombre de banlieusards travaillant à Paris est devenu quasi identique au nombre de parisiens travaillant en banlieue. Alors à quoi bon cette ceinture serrée qui étouffe ? A quand un périphérique métamorphosé en artère urbaine avec ses arbres et ses pistes cyclables.

Si Paris accepte la périphérie pour grandir il ne restera plus que les adeptes de la "démocratie du sommeil" pour se réfugier derrière des frontières administratives dépassées, en retard d'une guerre. Le périphérique est devenu une ligne Maginot, le chef d'oeuvre désormais inutile d'une époque dépassée.





Gilles Rabin est économiste.
Il est l'auteur avec Luc Gwiazdzinski de plusieurs ouvrages qui mettent en avant
sa vision et son approche hybride entre l'économie, les transports et la sociologie.

Photos: (1)  Pieter Louis  (2) Ludovic Maillard / Babel Photo

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